Le monde de la vigne et du vin au féminin

Les critiques et les remarques quelque peu belliqueuses de mes très adorables filles Marie et Joséphine sur les histoires racontées et vécues depuis cinq ans avec Martin, me font prendre la plume pour rectifier cette injustice filiale. Il est ma foi exact que je ne fus pas très attentif à l’intérêt putatif de mes gentes damoiselles pour le monde vitivinicole.

Pardon, mes chéries, pardon ! Mon mea culpa étant fait, je me suis tout de même penché sur le sujet de cet univers conjugué au féminin, tel  Indiana Jones à la recherche du Graal viticole.

– Joséphine et Marie, écoutez-moi ! Je vais parler de vous.

– Ah ! Enfin ! C’est Françoise qui va être contente…

– Il est vrai que depuis bien longtemps, le commun des mortels, lorsqu’ il parle de la vigne, parle d’abord des effeuilleuses… puis des vendangeuses et ensuite de la divine bouteille…

– Ben tu vois, il y a du féminin dans la vigne…

et je suis sûr que dans le vin, il y en a aussi.

– Oh, sûrement, demoiselles ! M’enfin… Donnez-moi des exemples, puisque vous êtes si «fémimalignes»…

– La terre… Une souche…

– Là, Jo, on commence très fort. On le tient…

– Facile ! Le vigneron… le cep…

– Une jeune pousse…

– Un bourgeon, un sarment, un échalas, un piquet, un rebiot !

– Une feuille, une effeuilleuse ! Une cisaille, une cisailleuse, une homme… !

– Jean Rosset…

– N’importe quoi… ! La neige, la pluie…

– Le gel… ça jette un froid… non ?

– La grêle, l’assurance, les ravines, la pelle, la hotte, la chenillette.

– Le «fossoir», le raclet, le portugais, Louis Moret…

– Pffffhhh, nul ! Marie-Thérèse Chappaz… Hé Marie, là, il est «scié» !…

– Le mildiou, l’oïdium…

– La maladie, l’araignée rouge…

– Le traitement…

– Et toc, la boille, l’écologie !

– L’atomiseur, le sulfate, l’hélicoptère, Monsieur Michoud…

– La chimie…

– Regarde, il ne sait plus quoi dire. Je vais le casser avec : Novartis, Bayer, la grappe,

la maturité, la vendange, les vendangeuses, 

la qualité, la commune de Payerne… la caissette, la camionnette…

– Ah ah… Pierre, Marc, le pressoir, le moût, le vin… le soufre…

– La cuve, la fermentation, les bourbes… et «retoc» ! La lie, la dégustation, la couleur, l’odeur… la vinification, l’œnologie !

– Attends, Jo, je t’appuie : la bouteille, la mise en bouteille, la capsule…

– Le bouchon, le tire-bouchon, le verre…

– L’étiquette, la graphiste, la table…

– Papa, t’as oublié le principal ! L’AMITIÉ ! T’as perdu: 15-40, balle de break, jeu, deux sets à rien…

– Ah là, je reconnais, mes filles chéries ! J’abandonne. Cyrano s’envolait d’une tirade d’adjectifs de goût dans le denier journal, eh bien là, vous êtes les Roxane de ce numéro. Vous nous prouvez la féminité de la vigne et de son fruit. Devant vous, gentes dames, je m’incline. Il est vrai que la vigne est une plante, ma foi belle, qu’elle nous donne des grappes pour en faire une divine boisson qui réjouit nos pensées. Je suis «dépittet». Viens, Martin ! Je ne sais pas si la femme est notre avenir mais regarde… Joséphine et Marie vont à la vigne… rejoindre Sylvie… Tout arrive…

– Ouh la la, j’crois bien qu’on est «commis» chez nous ! Maman a sûrement fait une liste et cette fois, c’est nous qui devrons faire les «commis»… même si c’est un mot féminin !

                                                               Nicolas Pittet